Escapade fugitive

Seul. Ce mot sans agrément fait si peur. A certains, il fait mal. Surtout quand le moyen de se prouver que l’on existe, c’est de le faire à travers les autres. Se sentir vivant en ressentant les autres. Voilà maintenant deux ans que Dashel parcourait inlassablement la Citadelle du Vent. Elle était devenue son refuge, plus que son simple district. Il avait travaillé si dur, pour ça. Une place au frais ? S’il avait su qu’être gardien d’un Sceau était si lassant, il aurait reconsidéré l’issue de son choix. Mais Orphen savait si bien parlé, Orphen était si beau, Orphen était si intelligent. Comment ne pas exécuter ces ordres, si raffinés qu’ils passaient pour des devoirs destinés ? Ca y est, il l’était maintenant. Gardien du Sceau du Vent. Savait-il seulement qu’il n’était gardien que de lui-même ?

Dashel resserra l’étoffe fine autour de ses bras, ses yeux plongés dans l’horizon voilé de crépuscule. Ses épaules s’affaissèrent sous la force d’un soupir. Combien de fois avait-il formulé muettement cette question ?

*Puis-je me permettre de fuir ?*

Un lâche était-il seulement un jour légitime dans sa démarche ?...

Ses paupières se clorent doucement. Sa conscience en prendrait sûrement un coup. Et puis que penserait Orphen ? Serait-il en colère ? Déçu ? Triste ? Peut-être tout à la fois, et ce, contre lui, Dashel.

Mais il voyait les jours défiler, chaque seconde s’égrainer… Il avait déjà dix-neuf ans. Le sacrifice de sa propre existence se justifiait par une cause bien plus noble que son bonheur personnel. Protéger le Sceau du Vent, protéger l’Humanité. Tant de grands mots pour ce qu’il avait réellement à faire ici, dans la Citadelle. Il était enfermé. Non.... Emprisonné. Il se sentait en cage dans cette radieuse construction de bronze et de saphir. Saphir... Il attrapa le pendentif qu’il portait au cou. Sa mère lui manquait tant. C’est d’elle qu’il avait hérité ce collier. Sa mère qui vieillissait...

Il ne servait à rien ici. Il passait ses journées à se distraire en lisant, en utilisant ses pouvoirs, en rêvassant.

*Excuse-moi Orphen... Je ne suis pas capable de faire tout ce que tu me demandes.*

Cela le mettait vraiment mal. Il se sentait tellement égoïste. Mais il avait mûrement réfléchi à son projet. Il ne savait pas où cela allait le mener, ce qu’il allait devenir, s’il le regretterait. Une seule chose était certaine. Il ne changerait pas d’avis. Il était libre de partir de toute façon.

Il avait lentement grimpé sur le bord de la fenêtre, ouverte sur le vide. Sous ses pieds ballants, cinq cent mètres d’air agités de courants violents.

Il déglutit difficilement face à ce spectacle.

*Heu... Peut-être que ce n’est pas une si bonne idée...*

Son regard anxieux resta figé quelques instants vers le bas. Il prit une profonde inspiration, resserra ses doigts sur le petit ballotin d’effets personnels qu’il emmenait avec lui, le replaça dans son dos, puis sauta.

Une longue chute libre s’en suivit. Les membres totalement crispés par la peur, Dashel ne réagit d’abord pas, se contentant d’observer à travers ses cheveux ondulant la Citadelle qui semblait s’éloigner de lui à grande vitesse.

Il se souvint juste à tant des violentes bourrasques qui feraient de lui de la chair à pâté s’il continuait de chuter dans leur direction sans rien faire. Il prit la situation à deux mains et utilisa ses pouvoirs. Un courant de vent vint le soutenir et ralentir sa chute, jusqu’à l’immobiliser dans les airs. Il reprit son souffle et ses esprits. C’était la première fois qu’il faisait une chose pareille. Les yeux rivés vers le contrebas, il remarqua les courants de fluide puissants qui formaient comme un bouclier. C’était lui le Gardien du Sceau, lui le Gardien de la Citadelle après tout. Il devait sûrement avoir les pleins pouvoirs sur le système défensif de la cité des airs. Il se concentra. Comme si tout obéissait à sa simple pensée, il distingua le courant principal s’espacer en son milieu pour créer un passage. Sans attendre une seconde de plus, Dashel se laissa retomber. Il passa juste dans l’orifice béant qu’il avait créé. Après être passé, l’orifice se referma, comme si de rien était.

Le véritable Sceau se sentit soulagé. Il n’avait plus qu’à atterrir en douceur sur le sol que l’on apercevait à deux ou trois centaines de mètres. Une brise magique le soutint quand il fut plus près de la Terre et il posa ses pieds avec délicatesse sur le sol glacé d’un blanc immaculé. De petits tourbillons de poudre blanche et froide s’envolèrent sur l’impact de ses chaussures. Immobile et inexpressif, il resta là une ou deux minutes, le temps de réaliser ce qu’il venait de faire. Il était libre à présent...

Il s’accroupit et toucha du bout des doigts la neige fine. Un petit vent d’ouest rabattit ses cheveux blonds devant son visage effrayé. Où pouvait-il aller maintenant ?

Il jeta un regard panoramique à ce qui l’entourait. Un désert de glace. Rien que du blanc à l’horizon. Il sentit la panique monter en lui et sous une pulsion qu’il ne saurait expliquer, il se mit à courir aussi vite qu’il le pouvait à travers la plaine. Plusieurs minutes s’écoulèrent sans que ne faiblisse son allure. Il était perdu au milieu de nulle part. Pour être plus précis, au milieu de Rystal, le désert blanc... Il n’y avait aucune vie à des kilomètres à la longue.

Au bout d’un moment, Dashel ralentit, puis s’arrêta, glissant à demi sur la glace. Il avait toujours sur ses épaules sa cape en soie fine. Pas forcément très pratique pour se préserver du froid. Ses yeux bleu-vert posés sur l’horizon toujours aussi blanc commençaient à se remplir de larmes. Ses joues avaient rougi de froid, comme son nez et ses oreilles. Ses lèvres violacées tremblaient. Son abdomen se soulevait puis s’abaissait rapidement, essouflé qu’il était d’avoir tant couru.

Allez, ce n’était pas le moment de désespérer. Il recommença à courir faisant se lever un vent violent qui le porta au dessus du sol. A deux mètres au dessus de la surface glacée, il put prendre de la vitesse. La situation lui sembla moins problématique. Il suffisait qu’il vole ainsi pendant un petit moment et il atteindrait l’Emerald. Alors il continua pendant un long, très long moment.

La nuit était tombée. Quelle idée de partir au crépuscule. Décidément il avait encore bien du chemin à parcourir sur le sentier de l’expérience. Pour ce qui était du sentier terrestre, il était toujours aussi glacé. Mais à quelques kilomètres pointait une touche d’espoir. Le feuillage vert d’un bois de l’Emerald laissait percevoir sa chatoyante couleur sous les reflets bleutés de l’astre nocturne.

*Encore un petit effort...*

Utiliser ses pouvoirs puisait dans son énergie vitale. Il allait bientôt être à bout de force. Son objectif pour l’instant présent était juste d’atteindre la forêt. Là-bas il pourrait se reposer au pied d’un arbre, sur un tapis de feuilles. Personne ne pouvait survivre à une nuit dans le froid glacial de Rystal.

Se sentant faiblir, il se laissa redescendre au sol. Tremblant de froid, il entreprit de parcourir les derniers mètres à pied. Ses pas titubants finirent par piétiner les premiers brins d’herbe qui perçaient à travers la glace, pour enfin le mener dans l’obscurité inquiétante du bois.

Il sursautait au moindre craquement, ses mains crispées sur ses bras couverts par sa cape. Il décida de marcher encore... Ce qu’il fit pendant un moment encore. Jusqu’à craquer. Il se recroquevilla entre les racines d’un vieil arbre. La nuit cachait son visage encore plus pâle que d’habitude. De sombres cernes soulignaient ses yeux fatigués tandis que ses lèvres avaient perdu leur couleur rosée.

*C’était de la folie...*

Il imaginait son confort tiède et doux, là-haut dans la Citadelle. Qu’il aurait aimé s’y trouver en cet instant précis.

Perdu en plein milieu de la forêt, en pleine nuit, dans le froid mordant. Ce fragile Gardien paraissait plus être un enfant perdu que le maître du Vent.

(Si quelqu’un pouvait porter secours à ce stupide petit gars, j’en serais très heureuse ! Que ce soit tout de suite ou le lendemain matin en le retrouvant endormi et frigorifié lol ! )

(Si ça te convient ^^)

Elle sifflait... Enfin, elle chantait mais cela ressemblait plus à un sifflotement à travers son bec. En un sens, ce n'était pas plus mal étant donné qu'elle s'amusait à fredonner une chanson grivoise. C'était la dernière en date qu'elle avait apprise de la bouche d'un vendeur de spiritueux fort consciencieux... Effectivement elle l'avait rencontré dans une taverne fort occupé à tester la différence de qualité entre les produits de la dite taverne et les siens. Il s'était mit à chanter juste avant de s'écrouler parfaitement ivre mort, roulant sous la table sans plus de cérémonie.

*Dans notre ville est venu, Un fameux joueur de Luth. Pour attirer la pratique, Il a mis sur sa boutique : " A l'auberge de l'écu, On apprend à jouer de l'épinette, C'est ici qu'pour un écu, On apprend à jouer du ..." *

Techniquement, un phénix ne pouvait pas rire, la physionomie d'un bec excluant toute présence de zygomatiques. Mais ses yeux pétillaient de façon caractéristique, elle s'amusait beaucoup, perchée sur une racine, à fredonner une chanson peu romantique, en observant un jeune jouvenceau en train de dormir. Etrange berceuse qu'il devait percevoir à travers ses songes...

Elle l'avait trouvé quelques heures plus tôt alors qu'elle s'enfonçait dans les bois à la recherche de bois mort pour pouvoir faire un feu pour la nuit qu'elle s'apprêtait à passer à la belle étoile. Elie était quasiment tombée sur lui, ne se retenant au tronc de l'arbre qu'in extremis... Techniquement parlant elle ne s'était pas attendue à trouver un beau au bois dormant dans ce froid, au pied d'un arbre. La jeune femme était restée quelques instants à l'observer. Une fine cape... Rien de bien efficace pour lutter contre le froid. D'un autre coté il était mignon, et certes amusant, à dormir comme ça. A croire qu'il était tombé tout droit d'une balade de barde, sans trop savoir où il mettait les pieds. Elle avait alors allumé un feu près de lui histoire qu'il se réchauffe... Mais il n'avait pas prit beaucoup plus de couleurs. Et en désespoir de cause elle avait posé sa lourde cape sur lui et prit sa forme originelle à ses cotés...

Maintenant elle était à à peine quelques centimètres de lui, essayant de le réchauffer grâce à la chaleur qu'elle procurait d'elle-même selon sa volonté. Mieux que le chauffage: au moins il ne se brûlerait pas au passage. Par contre le réveil du jeune jouvenceau risquait d'être assez étrange, c'est pas tous les jours qu'on se fait veiller par ce genre d'oiseaux. Elle était restée éveillée un peu trop longtemps à son goût, devant rester concentrée pour réguler sa température... Et c'est pourquoi que maintenant, elle fredonnait hardiment ses chansons, histoire de ne pas piquer du nez... Ou du bec pour être plus exact.

Elle n'en restait pas abominablement intriguée par cet étrange personnage qui avait du sombrer, ivre de fatigue, au pied de cet arbre. D'où venait-il? qui était-il? Pourquoi n'avait-il pas cherché à allumer un simple feu? Pour ne pas être repéré...? Bref, à force de cogiter toute seule à) l'observer dormir paisiblement, elle avait échafaudé plus de mille théories plus folles les unes que les autres...
De toute façon elle avait du temps à perdre, n'étant attendue nul part. Et puis, elle ne faisait que se laisser porter par les courants aériens la plupart du temps. En somme une chance pour lui qu'elle ait décidé de s'arrêter ici pour monter son camp pour la nuit...

Recroquevillé au creux des racines de cet arbre gigantesque, Dashel avait sombré sans plus attendre dans un sommeil lourd. Le froid n’avait réussi à garder ses yeux ouverts, il était trop épuisé. Il ne lui restait que peu d’énergie vitale. Sans un bon gros dodo, c’est la mort qui l’aurait atteint. Comme un chaton perdu au milieu des bois, il était roulé en boule sous sa cape de soie. Son corps tremblait intégralement, du bout de ses orteils à la pointe de ses cheveux platine. Mais des songes agités occupaient son esprit endormi. Dans son rêve, pris d’un remord soudain, il faisait demi-tour en direction de la Citadelle du Vent. Mais ne la retrouvait pas. A sa place, un tas de ruines fumantes. Orphen au milieu d’elles, agonisant pour des raisons inconnues. Puis ses idées dérivaient. Il revoyait sa mère. Mais loin d’être la belle danseuse d’antan, c’était une petite vielle toute ridée et folle qui s’acharnait à lui dire qu’il était un lâche. Enfin il voyait ses camarades gardiens... Et puis aussi... Mais encore... Tout était flou en un amas de pensées confuses.

Puis peu à peu, le calme. La sérénité.

Il n’y avait plus de regrets, plus de craintes. Son angoisse se voyait reléguée au dernier rang de sa conscience. A présent, juste cette chaleur, cette mélodie. Quelques choses le berçaient. Il était bien, comme dans un cocon doux et chaud. En position fœtale, il se sentait dans un tel confort que son repos se fit plus régénérateur.

Ses lèvres reprenaient peu à peu une couleur normale et les soubresauts violents qui agitaient ses membres semblaient se calmer. Et tout ça grâce à un regain de chaleur. Qu’avait-il bien pu se passer pour que le froid qui l’englobait disparaisse ainsi ? La réponse était simple. Quelqu’un avait déposé sur ses épaules frêles une cape épaisse et à ses côtés on avait allumé un feu qui crépitait doucement, couvert par le sifflement gai d’un inconnu. Des heures passèrent ainsi, tranquillement. Du moins pour Dashel.

Il finit par émerger des bras de Morphée. Il ouvrit langoureusement ses paupières lourdes, dévoilant ses prunelles couleur de l’eau. La première chose qu’il distingua fut le foyer incandescent allumé non loin de lui. Sans réagir, il resta à le contempler durant quelques minutes, avant de daigner regarder ailleurs. La forêt... Il voyait les troncs qui montaient au ciel, droits et sombres, avant de se perdre dans un océan de vert parsemé des rayons rosés de l’aube. L’odeur qu’il percevait mêlait effluves de mucus et fraîcheur de la rosée.

*Qui a allumé ce feu ?...*

Il se décida enfin à scruter ses alentours proches. Il tomba sur un gros oiseau, juste à côté de lui.

" AH !!! "

Il se redressa vivement sur son séant. Le cœur battant à tout rompre et le visage défiguré par la surprise, il garda fixé sur le volatile son regard exorbité. Quelques secondes passèrent dans le silence, sans qu’aucune réaction n’atteigne son cerveau.

*Mais qu’est-ce que...*

Enfin, ses sourcils blonds à peine visibles se froncèrent délicatement. S’il tenait le silence, c’est parce que parler à un oiseau ne faisait pas partie de sa logique. Les animaux ne parlaient pas après tout. Mais celui-ci était spécial.

Intimidé par le phoenix, Dashel s’enfonça un peu plus entre les racines, s’adossant au tronc.

Etait-ce cet oiseau qui l’avait accompagné pendant son sommeil ?

Ca ne coûterait rien d’essayer de communiquer avec lui... Le bout de sa langue vint nerveusement humidifier ses lèvres avant que sa voix peu assurée ne s’élève.

« Bon... Bonjour... »

C’était pas mal pour un début. Et pris sur le fait de cette manière, l’inspiration ne coulait pas de source.

Le phénix avait suivi l'évolution du réveil du jeune inconnu... L'émergence de la conscience du confort ouaté du sommeil se lisait toujours sur un visage, par touches délicates allant du froncement de sourcils au simple soupir. Eli avait donc cessé de siffler petit à petit, histoire qu'un trop brusque silence ne l'inqiète pas inconsciemment..

*Je paris sur du bleu...*

Gardant un tempéramment bien féminin, l'oiseau se lissa les plumes avant que le jeune homme ne se réveille complètement et ne pose son regard sur elle. Quitte à faire, autant faire bonne impression pour une première fois, non? Elle le vit enfin se relever de son lit improvisé, baladant son regard sur les lieux alentours afin de mieux comprendre les changements qui s'étaient effectués depuis qu'il avait sombré dans le sommeil. Au moins espérait-elle qu'il ne pensait pas être tombé entre les mains de quelconques brigands qui attendaient gentilment qu'il se réveille pour voir à qui envoyer la demande de rançon...

Finalement il tourna la tête vers elle... Presqu'immédiatement Eliamenthe bomba légèrement le torse histoire de paraître bien. Son regard ambré chercha celui de l'inconnu afin de voir si elle avait gagné son pari avec elle-même... Elle n'eut pas spécialement le temps de bien réaliser que Dashel criait avec toute la conviction de la surprise, surprise qui se passa à Eli qui ne st'attendait pas à ce type de réaction. Instinctivement elle prit son envol et se posa sur une branche au-dessus de Dashel, se baissant pour mieux le voir. Elle sentait son coeur battre la chamade.

*C'est pas une façon de dire bonjour ça...*

Le temps s'égraina tranquillement alors que le silence s'installait entre eux deux. Ils se dévisageaient, presqu'aussi intrigués l'un que l'autre, alors que leur rythme cardiaque se calmait peu à peu... Bleu-vert. Elle avait gagné. La couleur allait bien avec le reste du personnage qu'elle ne trouvait pas dénué de charme. Sa exacerba encore un peu plus sa curiosité à son égard. Que diable venait-il faire ici?

Eli finit par s'envoler de sa branche, revenant se poser aux cotés de Dashel, à une distance résonnable afin de ne pas plus le stresser. Toute à son occupation de le détailler, tête penchée, elle oubliait complètement que son état d'oiseau n'était pas spécialement de première utilité pour la communication. Elle revint à cet état de fait lorsque le jeune homme osa ennoncer un "bonjour" plus qu'hésitant...

Le phénix prit son envol et alla se poser sur un tas de vêtements de couleur rouge qui se trouvait non loin du feu. Elle reserra ses serres dessus puis elle pencha la tête sur le coté et émit un petit sifflement... Pour elle cela signifiait qu'il devait attendre quelques instants, juste de quoi lui permettre de se changer et de s'habiller. Elle reprit son envol et disparut derrière un arbre juxtaposé à un buisson non loin...

*Y'a plus qu'à espérer qu'il ne bougera pas...*

Eliamenthe reprit sa forme humaine avant de s'empresser de s'habiller... Même si elle restait plutôt agréable à regarder, ajouter l'apparition d'une femme nue à la surprise de son réveil risquait de se révéler fatal pour lui... Elle finit par émerger de derrière sa cachette à peu près présentable. Elle était en train de finir d'attacher le haut de son vêtement mais restée pieds nus et cheveux détachés et surtout, parcourus de plumes rouges et jaunes. Elle sourit avant de s'installer à coté du feu, non loin de Dashel, à l'endroit où elle avait abandonné ses bottes.

Elle lui laissa quelques instants avant de sourire chaleureusement

-Maintenant je peux vous répondre... Bonjour!

Son regard pétillant ambré était facilement reconnaissable, du moins l'espérait-elle. Elle atrappa un ruban rouge et entreprit de se nouer les cheveux, regardant le feu pour voir si elle devait recharger en bois... Ce qui ne semblait pour l'instant pas nécessaire...

-Bien dormi?

Dashel avait fait peur à l’oiseau. Ce dernier, dans un froissement de rouge et or, se retrouva sur une branche au dessus de sa tête. La seule réponse en premier lieu à laquelle eut droit le Sceau fut un silence ponctué de regards curieux. Un léger envol et le volatile se trouva à nouveau non loin de lui. Sur la défensive face à cette étrange oiseau, le blondinet recula encore, tant que possible, son dos complètement plaqué au tronc cette fois-ci. Son visage reflétait sa crainte prudente. La bestiole continuait de l’observer, son crâne penché sur le côté. Dans le silence du sous-bois on entendit parfaitement la déglutition apeurée du jeune gardien. L’oiseau prit à nouveau son envol pour aller poser ses serres acérées sur un tas de vêtements que Dashel remarqua pour la première fois.

*Des vêtements ?...*

Le phoenix laissa échapper un sifflement puis battit des ailes jusqu’à atteindre sa cachette derrière le buisson. Le pouls du blond accéléra. Qu’allait donc faire cet oiseau avec ces habits ? Qu’allait-il, lui, voir débarquer ?
Un brusque tremblement l’agita, signe de sa panique soudaine. Maladroitement, il s’appuya à son arbre pour se relever, manquant de retomber tandis que ses prunelles scrutait anxieusement le buisson. Il entendit un bruit de vêtements plissé qu’on enfile.

*Merde merde merde...*

Il songea à prendre la fuite quand dans un ultime bruit de feuilles, une jeune femme apparut de derrière l’arbuste. Elle vint tranquillement s’asseoir près du feu avant de lui sourire comme si de rien était, finissant de s'habiller. Une jolie brune avec de longs cheveux et un regard ambré très prenant. Elle lui rendit son bonjour, comme si pour lui, voir un oiseau disparaître derrière un buisson et réapparaitre en femme était tout à fait naturel.
La bouche béate, il se contenta de la dévisager, tout penaud qu’il était d’avoir eu si peur pour ça. Le ça en question s’étant révélé être une charmante jeune femme.
Il mit du temps à relever sa question, silencieux et la bouche ouverte, comme un poisson mort hors de l’eau.

« Heu... Je... »

Il hocha simplement la tête en glissant à nouveau contre le tronc, pour se retrouver assis les fesses dans les feuilles.

« Très bien... Grâce à vous je présume... »

Mais les remerciements ne semblèrent pas retenir sa curiosité plus longtemps. Après quelques instants de silence observateur, sa langue sembla se délier.

« Vous êtes une créature ??? »

Quelle question stupide. Si elle n’en était pas une, comment avait-elle fait pour se changer en oiseau. D’ailleurs...

« Et c’est quoi cet oiseau ??? »

Le ton de sa voix était curieux et amical. Il baissait bien vite sa garde. Peut-être avait-elle de mauvaises intentions à son égard. Et lui, jeune homme stupide et inexpérimenté qu’il était, tombait en plein dans le panneau. Mais bon, avec un peu de chance, cette demoiselle était juste de passage et ne lui voulait aucun mal.
La bouche toujours aussi ouverte en attendant la réponse, Dashel sembla se rendre compte de son attitude. Il clôt ses lèvres soudainement, gêné.

« Ex... Excusez-moi, cela ne me regarde pas. »

Eli' fut assez amusée de voir Dashel bouche bée en la voyant ainsi débarquer. Elle délogea une plume rouge accrochée à ses cheveux et s'amusa à la caresser du bout des doigts avant de souffler pour la faire s'envoler... Elle soutenait l'instant d'observation nécessaire au jeune homme. Après tout le changement d'apparence était assez déroutant lorsque l'on s'y attendait pas. La jeune femme eut un sourire entendu lorsqu'il supposa qu'elle l'avait aidé à passer une nuit à peu près correcte. Elle l'accepta l'accord tacite de répondre d'abord aux questions de Dashel avant de poser les siennes...

-Oui je suis bien une créature... Un phénix pour être plus précise.

Elle avait eu un sourire amusé lorsqu'il avait posé la question... Ce jeune homme avait un charme enfantin, un brin naïf, qui était loin d'être désagrable. Elle posa ses mains en appuit, derrière elle, étendant les jambes en les croisant légèrement... Elle avait une attitude un brin désinvolte ainsi, légèrement cambrée. Elle lui sourit, cherchant à croiser son regard, restant franche et honnête

-Vos questions étaient légitimes... Après tout je n'étais pas là lorsque vous vous êtes endormi. Au moins ne suis-je pas un quelconque brigand, je vous aurai dépouillé depuis longtemps sinon...

Elle le concidéra encore quelques secondes, le sourire en coin, le regard ambré pétillant

-Par contre si je ne suis pas avide d'or et argent, je suis abominablement curieuse! Vous pouvez m'appeler Eli' mais je me demande quel est votre nom depuis déjà pas mal d'heues!!

Elle se demandait aussi ce qu'il pouvait bien faire là aussi mais la question viendrait plus tard... S'il n'abordait pas la chose par lui-même...

En attendant elle se releva légèrement pour relancer une buche dans le feu afin qu'il ne s'éteigne pas. Le soleil était levé mais la saison restait plus que froide. Eli espérait qu'ils puissent se déplacer plus au niveau des plaines par la suite, plain où le soleil pourrait directement les réchauffer de ses rayons....